Julie et moi, on voulait faire un trajet de style « mari usque ad mare » en vtt sur la Côte-Nord. Traduction adaptée à notre situation: d’un « boutte » de sentier à l’autre « boutte » de sentier, soit entre l’hôtel Pelchat, aux Escoumins, et la rivière Moisie, à Sept-Îles.
Nous avons dû reporter plusieurs fois ce projet de voyage en VTT, entre autres à cause de nos disponibilités et des problèmes majeurs sur certaines portions de sentiers. Par exemple, la fermeture des ponts de la rivière Sault-au-Mouton ainsi que la rivière aux Pins en 2019. Il n’était plus possible aussi de traverser l’ancienne passerelle qui traversait la rivière du Sault aux Cochons. Des travaux majeurs sur ces sentiers ont été faits en 2020 et en 2021.
De plus, le sentier est toujours coupé entre Baie-Comeau et Godbout. Des investissements majeurs seraient nécessaires pour relier les deux villes et ce n’est pas pour demain. Un travail de recherche s’impose afin de trouver un moyen de passer sur les terres publiques au nord de Baie-Comeau. Un trajet pour notre voyage en VTT est finalement trouvé. Malheureusement, il n’est pas possible de le faire sans devoir prendre une partie de la route provinciale. La solution est de faire transporter les quads sur une distance d’environ 10 km. C’est déjà mieux que les 60 km de route provinciale qui séparent les deux villes.
Comme nous faisons garder notre enfant par mon beau-père, il a accepté de nous accompagner. En effet, ils vont nous suivre en camion par la route, d’hôtel en hôtel. On a donc notre moyen de transport.
Jour 1 : Les Escoumins – Baie-Comeau
C’est le début! Une belle journée s’annonce. Nous décollons des Escoumins pour se rendre à Baie-Comeau. Cela commence par de beaux chemins forestiers qui nous mènent vers la pourvoirie Shamrok et ensuite vers la zec D’Iberville. De beaux sentiers sinueux. L’immensité du paysage nous fait réaliser qu’on est vraiment dans le bois, c’est rustique et loin de tout. Un sentiment d’aventure nous envahit.
On a essayé d’aller voir les chutes Philias, la centrale et la prise d’eau d’Innergex. Malheureusement, tout est barré sauf la prise d’eau qui est aussi un débarcadère à canot. On en profite pour prendre une pause à cet endroit. Ensuite, on se rend jusqu’à Forestville.
On s’approvisionne en lunch et en essence. Nous sommes allés dîner sur le pont de la rivière aux Pins, à proximité d’un lac du même nom. Une fois rassasiés, on enfourche nos quads pour parcourir les 140 km qu’il reste à faire avant d’arriver à Baie-Comeau.
Beaucoup d’infrastructures impressionnantes
Rendus dans le coin de Chutes-aux-Outardes, on a eu un peu de mal à passer la double porte de la barrière. On se demande comment les côte-à-côte peuvent passer. Après avoir traversé, nous avons remarqué un petit sentier de contournement pas loin de là. Nous ne sommes pas sûrs si c’est fédéré, mais l’important est que nous sommes passés.
Depuis le départ, nous avons traversé plusieurs infrastructures qui sont toutes impressionnantes, mais il y en a une qui ne peut nous laisser indifférents. C’est la fameuse passerelle qui traverse la rivière Manicouagan à Baie-Comeau. Elle est haute de 27,4 mètres et longue de 213 mètres. C’est un ancien arboriduc (log flume), une glissoire d’eau pour transporter les billes de bois jusqu’à l’usine de pâtes et papiers. Elle a été construire en 1937 et une partie de la structure est conservée pour en faire un sentier de quad et motoneige.
Lorsque je suis passé sur cet ouvrage en 2006, il y avait une barrière en plein milieu de la passerelle. En effet, il fallait être membre du club quad du secteur pour avoir la clé afin de pouvoir passer. Heureusement, ce n’est plus nécessaire.
Nous sommes rendus au motel à Baie-Comeau vers 18 h après avoir parcouru plus de 268 km. Tout de suite en arrivant, on embarque nos quads sur la remorque. En effet, le lendemain matin, il faut faire 10 km de route provinciale pour rejoindre l’autre section du sentier.
Jour 2 : Baie-Comeau – Baie-Trinité
Une autre belle journée s’annonce. Vers 8 h 15, nous roulons en camion jusqu’à l’autre section du sentier pour ensuite décharger les quads. Les premiers kilomètres sont un chemin forestier et nous roulons à une bonne cadence. Nous arrêtons à proximité des chutes à Gadou pour prendre une pause.
Nous avons entendu parler d’une section du sentier plus au nord qui serait inondée, mais on ne savait pas la profondeur de l’eau. En roulant, on croise une famille sur le bord du chalet. On lui demande si ça passe et elle nous dit que ça devrait passer mais seulement en quad, pas en voiture.
La nature reprend ses droits sur le sentier
Plus on monte le sentier rétréci, plus cela devient sauvage. À proximité du lac Blanc, le sentier est effectivement inondé par un barrage de castor.
Je fais un premier essai au milieu du sentier et l’eau monte rapidement jusqu’au-dessus des lumières. Pas le choix, il faut reculer. Je réessaie en roulant plus proche sur le bord du sentier tout en longeant les arbustes. Ça semble bien fonctionner. Soudainement, plus loin, le devant du quad cale d’un coup sec jusqu’au-dessus du rack. Il y a sûrement un canal au fond de l’eau. Il reste 15 pieds avant de rejoindre la terre ferme. Si proche, si loin! En avançant encore doucement, le devant ne semble plus s’enfoncer. Confiant, je donne un bon coup de gaz et je finis par traverser en remontant rapidement vers la surface sèche.
On prend une petite pause rapide et ensuite, on monte jusqu’à la pourvoirie du Lac Cyprès. Rendu là, on approvisionne nos quads en essence. De plus, nous avons une discussion intéressante avec le sympathique propriétaire de l’endroit, Charles Pinard. Il ne s’attendait pas à nous voir arriver en VTT chez lui à partir de Baie-Comeau. Pour être honnête, cela a flatté notre égo, hé hé! Si on n’avait pas le reste du trajet à faire, on serait restés à jaser avec lui.
En route vers Godbout
Nous quittons la pourvoirie et nous nous dirigeons vers le sud, soit vers Godbout. Sur le chemin, nous devons traverser la rivière Godbout en ponton. Il y a un pédalo à proximité pour pouvoir aller chercher le ponton qui est de l’autre côté de la rivière. Nous embarquons les quads sur celui-ci et il faut tourner le treuil pour traverser.
Rendus de l’autre côté, on s’arrête sur le bord de la rivière pour dîner. Ensuite, on descend jusqu’à Godbout. Après avoir traversé le village, on se bute à un pont bloqué avec des blocs de béton. Le sentier affiché dans iQuad ne semble pas à jour. En cherchant la voie de contournement sur le GPS, il semble y en avoir plusieurs. Afin d’éviter de déranger les habitants du village et de potentiellement passer sur des terrains privés, on appelle le président du club du coin. Il nous indique par où passer pour contourner cet obstacle.
Destination du jour : Baie Trinité
Nous nous dirigeons vers Baie-Trinité. Les premiers 25 kilomètres, c’est du vrai sentier de quad, des côtes, des roches et même de l’herbe haute. On aime ce genre de trajet-là!
On croise un tracteur qui est conduit par le président du club qu’on a appelé. Il nous avise que le sentier plus loin devant nous est barré par de nombreux arbres tombés et nous explique par où contourner.
Pas loin de Baie-Trinité, on croise de nombreuses voitures stationnées sur le bord du sentier, même de petites compactes qu’on ne s’attendait pas à voir à cet endroit. On en croise plus d’une centaine. Un couple passe à côté de nous à pied et on s’informe de la raison de la présence de ces nombreux véhicules. Il y a un événement appelé « Rainbow Gathering » sur le bord de la mer. Chaque année, ils cherchent un endroit gratuit où ils vont habiter en groupe et en autonomie pendant un certain temps.
Nous sommes rendus à Baie-Trinité vers 18 h. Distance totale : 228 km.
Vous pourrez lire la suite de notre périple sur une autre parution du site web de Planète Quad!
Texte: Eric Leblanc
