Sylvain Arseneault, Arsene Racing, cela fait 37 ans que le champion québécois écume les championnats comme pilote pour trouver la lumière. Il œuvre également dans l’ombre comme organisateur, défenseur du quatre-roues racing. C’est aussi un préparateur reconnu internationalement qui affine les moteurs dans son atelier Arsène Racing de Notre-Dame-du-Mont-Carmel et envoie des pièces sur la plupart des continents.
Sylvain est né à Shawinigan le 27 janvier 1965. Son père était un passionné de motoneige, et très jeune le son du moteur deux temps et l’odeur de l’huile brûlée ont fait partie de son univers.
Dès l’âge de 6-7 ans, Sylvain posait les fesses sur le Ski-Roule de son papa. Celui-ci lui offrait un Honda CT 70 à 8 ans. C’est le début de la passion. Un autre souvenir lui revient : tenir le volant de la voiture familiale, assis sur les genoux de son père.
De bons moments malheureusement trop courts. Sa maman décédait en 1975, pour ses dix ans. Il perdait son papa trois ans après, dans sa treizième année.
Celui-ci avait une nouvelle conjointe qui devenait sa tutrice légale. Malheureusement pour lui, sa belle-mère n’aimait pas la moto. C’en était fini des balades en moto ou en motoneige. Enfin, pas totalement, car il pouvait compter sur une Mobylette pour se déplacer à 14 et 15 ans.
Puis la passion était trop forte, il s’achetait une moto en cachette.
Dès sa majorité, il devenait vendeur de motos. À 19 ans, en 1984, il travaillait chez Desprès Équipement, le concessionnaire Honda de Shawinigan. C’est alors qu’il tombait sous le charme d’un trois-roues Honda ATC 200S. Il le trouvait beau, mais n’avait aucune idée de la façon de le piloter.
Même sans réseaux sociaux, les nouvelles allaient vite à Shawi. Un compétiteur l’invitait à une course de trois-roues le lendemain même de l’achat. Sylvain ne possédait aucun équipement. Il prenait des chaussures de travail à cap d’acier et un vieux casque de motoneige à son père et c’était parti pour la première course qu’il remportait dans sa classe, à son grand étonnement. Mais la piqûre était prise.
Ha les trois roues ! Aucune stabilité. Mais quel bel apprentissage ! L’année suivante, il organisait des courses au bar Spot 55 à Shawinigan, au bord de la 55. Il achetait un ATC 250R et remportait le championnat canadien. C’était la fin des trois-roues. Les constructeurs n’en fabriquaient plus, car trop dangereux. D’ailleurs, le plus gros accident subi par notre pilote s’est déroulé sur ce type de véhicule.
En 1986, c’était la première participation au Supercross de Montréal. Avec maintenant un quatre-roues. Arsène, comme on le surnomme depuis, a pris part à plus de 20 courses au Stade olympique. Il est le pilote avec le plus de participations à cette compétition mythique qui réunissait jusqu’à 60 000 spectateurs dans les meilleures années.
Il a également été le directeur du programme de superquad pendant une quinzaine d’années pour le Stade olympique et Pierre Corbeil, l’organisateur. Il a fait venir des pilotes américains, dont des plaques # 1.
Dans un podcast avec Ben Milot, il a donné plusieurs anecdotes, comme le champion américain pro arrivé avec son quad de course hyper préparé et battu par un Jasmin Plante en pleine ascension, qui roulait sur un Yamaha Banshee bien inférieur sur papier.
Les années d’après, 87 à 89, un championnat MX quad a été créé, et Sylvain a participé et gagné. Il salue le travail de Buddy Ford qui a été le plus prolifique des organisateurs de championnats, puisqu’il s’est occupé du Dirt Track, du MX, des courses sur glace et même des premières courses de supermoto. Il a ramené de nombreux trophées et titres de champion canadien dans ces différentes catégories.
L’infatigable ambassadeur du VTT a été le premier pilote canadien à rouler aux 12 heures de Pont-de-Vaux en France, en 1999. Un souvenir impérissable de voir 18 nations rouler ensemble dans une course internationale. Il montera sur le podium en 2005, avec les Français Julien Tusset et Cyril Lamet. Il est le seul Canadien à avoir réalisé cet exploit. Il a aussi aidé la Fédération québécoise de quad à créer les 12 heures d’endurance de La Tuque.
En fait, chaque fois qu’il y avait une compétition de moto hors route, il appelait l’organisateur pour demander pourquoi les quads n’étaient pas représentés. Croyez-moi, son ton était convaincant !
En 1999, il a mis sur pied une série en collaboration avec l’ASM .
Les quads couraient avec les motos de superbike sur les circuits d’asphalte partout au Québec … Ça s’appelait : Superquader, du nom d’une série européenne. Sur le circuit de Saint-Eustache par exemple, à notre grande surprise et celle des motos surtout, les temps de VTT étaient de loin bien meilleurs que toutes les motos … à part les superbikes pro, ils nous avaient de 1,5 seconde, pas plus.
Il a géré les VTT pour Supermoto Québec, pour les courses sur glace à Valcourt, les courses Mc-Grégor, le retour du Dirt Track à Trois-Rivières en 2017 et les courses Elka Superquad au GP3R. Il a dû batailler plusieurs années avec Dominic Fugère, qu’il connait bien. Il a fait venir pour la première édition le champion national américain pour un plateau très relevé au niveau de la qualité du Grand Prix de Trois-Rivières.
Toujours à Trois-Rivières, il a aidé Marc-André Pagé de Flat Track Québec à relancer la discipline en 2017 dans l’hippodrome mythique où il avait gagné une douzaine de fois par le passé. Il se rappelle avec émotion le décès d’un de ses amis quadistes sur l’hippodrome en 2000. Un drame qui l’avait fortement marqué.
En 2017, il avait réalisé le meilleur temps en qualif, à 52 ans, avec des pointes à 153 km/heure. En 2018, une semaine et demie avant l’évènement, il apprenait qu’il avait un cancer de la glande salivaire. Les médecins ne lui laissaient pas le choix. Il devait être opéré immédiatement pour éliminer la glande infectée. Le visage était ouvert sur le côté de bas en haut. Même s’il ne pouvait pas courir, Sylvain était présent pour coordonner les courses quad du Dirt Track sur le H3R.
Comme il le dit à Ben Milot, mon nom a été pigé dans un chapeau pour ce cancer. Pourquoi moi ? Je suis sportif, je m’alimente correctement, j’ai une vie saine. Je l’ai vécu comme une injustice de la vie.
En 2019, il revenait en force sur son hippodrome fétiche et il gagnait la finale des pros, à 54 ans ! Encore un moment fort pour ce sportif de haut niveau qui ne veut pas raccrocher les patins.
Dans son palmarès sportif, il a été couronné quatorze fois champion canadien en course sur glace.
Il est certainement le seul québécois à avoir participé deux fois à une autre compétition de niveau international, le Superquader de Mettet, en Belgique. Il s’est aperçu que les Européens avaient une longueur d’avance dans l’organisation des courses, et il en a fait un modèle à suivre.
En tant que préparateur et distributeur de pièces racing, il rappelle qu’il est dealer numéro 7 chez le fabricant de suspension québécois ELKA. Comme les six premiers ont tous fermé leurs portes, il est le plus ancien distributeur en activité d’ELKA.
En 37 ans de carrière, il peut citer de nombreux pilotes et contributeurs du VTT racing. Mais il souligne la famille Desormeaux, et plus particulièrement Jeannot Desormeaux, pour qui il voue un très grand respect. C’est lui qui lui a appris toute la mécanique de performance, et Sylvain est parti de zéro. Mais un jour, au Supercross de Montréal 1994, le grand Jeannot a fait appel à Sylvain pour résoudre un problème de démarrage. Celui-ci se demandait pourquoi le maître demandait à l’élève. Mais Sylvain a trouvé la solution. Jean l’a remercié : Je n’y avais pas pensé !
Ce jour-là, « Arsène » a gagné ses galons de préparateur expert qui lui permettent de préparer de nombreux véhicules de course qui finissent sur les plus hautes marches des podiums.
S’il avait un message à donner aux nouveaux pilotes, il leur rappellerait qu’il faut pratiquer pour le plaisir, pour soi-même, et pas pour la pression parentale ou la reconnaissance des amis. Il n’y a pas d’argent à gagner, mais c’est un beau sport à pratiquer et une discipline de vie constructive.
Sylvain Arseneault espère côtoyer ces pilotes encore quelques années pour notre bonheur à tous, car il est un pilier incontestable du sport.